La rhétorique Ethos, Logos, Pathos : les trois mousquetaires de la conviction !

Oct 16, 2019 | Non classifié(e)

3 mousquetaires qui ne sortent pas de l’imagination d’Alexandre Dumas mais de la pensée féconde d’Aristote, élaborée 400 ans avant l’ère commune. Et pourquoi le grand Aristote élabore ces concepts savants ? Parce qu’il vit en Grèce bien sûr ! Dans une cité où s’est développée une chose radicalement nouvelle : la démocratie. Et avec elle les premiers hommes politiques « modernes ». Des orateurs qui, pour se faire élire, doivent convaincre leurs électeurs de voter pour eux. Et pour convaincre, nous dit Aristote, rien ne vaut un savant mélange d’Ethos, de Logos et de Pathos.

Bah, tout ça c’est vieux me direz-vous et, depuis 2400 ans, les choses et les gens ont changé et la manière de convaincre un auditoire a dû évoluer du tout au tout. Et bien non ! La trilogie Ethos, Logos, Pathos est toujours d’actualité. Car Aristote, c’est du sérieux et ses réflexions sont beaucoup plus durables que nos tweets modernes. Le concept s’applique aussi bien au champ politique qu’au monde de l’entreprise. Les nombreux managers qui cherchent à emporter l’adhésion de leur auditoire ferait bien de le connaitre. Alors : le voilà !

Le terme nous fait irrésistiblement penser à l’éthique. Et c’est bien de cela qu’il s’agit. Que nous dit Aristote à ce propos et quel est le rapport entre l’éthique et la conviction ? Quand je choisis un représentant, nous dit le philosophe, je me pose les questions suivantes : est-il digne de me représenter ? Partage-t-il mes valeurs ? Puis-je lui accorder ma confiance ? Est-il honnête, juste et droit ? Si la réponse est non, si, par exemple, je considère que c’est un filou plus intéressé par son intérêt que par le mien, ou si ses valeurs sont à l’opposé des miennes, alors j’ai peu de chances de lui accorder mon suffrage et ce, quelle que soit la qualité de ses arguments. Cet orateur dénué d’Ethos est tout simplement inaudible pour moi. Voilà pour le champ politique. Quid du monde de l’entreprise ? Après tout, dans l’entreprise, je ne choisis pas mon manager et lui-même ne m’a souvent pas choisi. Certes, mais, si je n’ai pas le choix de la personne, j’ai le choix de lui accorder ou non ma confiance.

Un manager au comportement inconsistant, qui « se la joue perso », ou qui ne respecte pas la parole donnée va rapidement perdre en Ethos et ne parviendra plus à tenir un discours convaincant. Il sera tout bonnement démonétisé aux yeux de ses collaborateurs. Au mieux, ces derniers se soumettront à son autorité hiérarchique en trainant les pieds. Et dès que l’occasion leur sera donnée… ils iront voir ailleurs.

Passons maintenant au deuxième mousquetaire de la conviction : Logos. 

Le terme fait bien sûr penser à la logique. Voici ce que nous en dit Aristote : si vous voulez convaincre un auditoire, vous devez lui tenir un discours cohérent. Attention, on parle là de logique rhétorique et pas de logique scientifique. Le champ argumentatif relève plus du raisonnable que du rationnel. On ne demande pas à un orateur de nous démontrer par A + B qu’il a raison, mais de nous tenir un discours qui fait sens, étayé par des faits vérifiables, bref un discours raisonnable. Vous l’avez compris, si l’Ethos est en rapport avec l’orateur, le Logos est en rapport avec le discours. Là aussi, le concept est aussi bien valable en politique que dans le monde de l’entreprise.

Quand, lors du débat du second tour de la présidentielle le candidat Macron dit à la candidate Le Pen « vous dites des bêtises madame » il attaque à la fois son Ethos (vous n’êtes pas sérieuse et donc indigne de représenter les français) et son Logos (votre discours n’est pas cohérent, vous mélangez les chiffres et les dossiers). Le concept a bien sûr également toute sa force dans le monde de l’entreprise. Tenir un discours construit et raisonnable a plus de chances de faire mouche qu’un discours sans queue ni tête. J’en profite pour donner un conseil amical à ceux qui présentent une suite interminable de chiffres en réunion (« et maintenant passons aux chiffres de la région Grand Est du 2ème trimestre ») Pitié ! Les chiffres peuvent étayer le Logos mais ils ne le remplacent pas. Ne vous contentez pas de présenter des chiffres en réunion, faites-les parler ! Suivant la formation, animez votre réunion avec conviction. Mettez-y du Logos ! Ainsi ceux qui vous écoutent se diront « voilà quelqu’un qui me tient un discours intelligent et me propose une perspective logique. Il me donne de bonnes raisons de le suivre ».

Formation – Préparer, animer et faciliter une réunion efficace

Cette formation a pour but de renforcer sa capacité à préparer et à animer des réunions efficaces et productives

Mais suffit-il d’avoir de bonnes raisons de suivre un orateur pour le faire réellement ? Hélas non. Nous avons tous assisté à des présentations où chacun s’accorde à trouver le propos de l’orateur logique et cohérent sans que quiconque se mette en mouvement pour autant. C’est normal nous dit Aristote. Il ne suffit pas de donner de bonnes raisons aux autres de nous suivre, encore faut-il leur donner envie de le faire ! Et l’envie, c’est le mousquetaire Pathos qui s’en charge.

Le Pathos (on reconnait le terme français empathie), c’est ce qui relève de l’émotion dans un discours.

Et dans « émotion », il y a « motion » qui veut dire « action de mouvoir ». L’émotion, c’est ce qui fait vibrer l’auditoire et le met en mouvement. Là où le Logos est l’art de la logique et du raisonnement, le Pathos est l’art de l’émotion et de la résonance. Faire vibrer, faire rêver, inquiéter, rassurer, faire rire ou pleurer : c’est tout l’art du Pathos. Mais pourquoi Aristote, un philosophe sérieux et porté sur les sciences, nous parle-t-il d’émotions me direz-vous ? Car en observant les hommes politiques face à de larges auditoires il constate une règle infaillible de l’art oratoire : plus le groupe qu’on veut convaincre est important, plus on doit valoriser le Pathos, quitte à le faire (parfois) au détriment du logos. Ecoutez votre leader politique préféré au cours d’un meeting et vous le constaterez : le Pathos l’emporte généralement sur le Logos. Et oui, une foule est une caisse de résonance, un grand cœur collectif qui palpite en cadence et avec lequel l’orateur doit se synchroniser.

Organiser et animer une réunion efficace et impactante

Prenons rendez-vous pour parler de vos besoins et construire ensemble votre projet de formation.

Le Pathos doit-il être réservé aux hommes politiques ? Bien sûr que non. Tout leader digne de ce nom est amené à l’utiliser. C’est même une des caractéristiques du leardership. Et, vous le savez comme moi, le manager du 21ème siècle reçoit quotidiennement l’injonction d’être un leader… Encore faut-il que les managers sachent utiliser le Pathos à bon escient. Or, dans beaucoup d’entreprises le Pathos semble à jamais délégué aux services marketing et communication.

Les marketeurs vont chercher à faire rêver le maximum de clients à coup de campagnes de publicité percutantes et les communicants vont payer à prix d’or des consultants chargés de créer une « tagline » inspirante, ce slogan censé définir « l’ADN » de l’entreprise et remplir les collaborateurs de fierté. Sauf que, lorsque je demande à mes clients quelle est la tagline de leur entreprise, ils ouvrent généralement de grands yeux, m’en citent une en hésitant, avant de se reprendre « euh, non, elle a changé depuis la réorganisation, maintenant c’est… euh, qu’est-ce que c’est déjà… un truc avec Innovation, euh, non, avec… Perfection, à moins que ce ne soit… Disruption » Jusqu‘à ce qu’un d’entre eux me regarde en coin et dise tout haut ce que beaucoup pensent tout bas : « Bon, peu importe, la tagline c’est du bullshit… » Aïe ! Pauvre Pathos. On t’a délégué à des consultants. Autant dire qu’on t’a vidé de ta substance ! Car là où le Logos relie les idées, le Pathos relie les personnes. Et quoi de mieux que l’oral pour se relier à autrui ? L’ennui, c’est qu’au pays des Grandes Ecoles et de Descartes le Pathos est suspect. Comme si parler avec son cœur était forcément le début d’une entreprise de manipulation collective. Du coup, de nombreux managers français sont désarmés devant ce concept.

Pourtant, à condition d’être accompagné du Logos et de l’Ethos, le Pathos a toute sa place dans un discours de conviction. Les anglo-saxons ne s’y sont pas trompés qui, depuis des années, utilisent le storytelling dans leur communication. Le storytelling consiste à raconter une histoire édifiante à son auditoire dans le but de le mettre en mouvement. Une histoire dans laquelle un héros, investi d’une mission qui le dépasse va chercher à dénouer une tension, tout en vivant mille et une péripéties. Et, dans le monde des affaires du 21ème siècle, les tensions et les péripéties, ce n’est pas ce qui manque ! Il ne vous reste plus qu’à trouver le héros de votre belle histoire. Vous, votre équipe, votre projet, votre produit ? Il y a le choix.

Mais attention, restez sincère pour ne pas perdre votre Ethos et cohérent pour ne pas oublier votre Logos.

Alors, prêt à relever le défi ? En avant manager mousquetaire ! De l’Ethos, du Logos et du Pathos. Un pour tous ! Tous pour un ! Et notre formation managériale.

Questions fréquentes

Qu'est ce que Ethos ? Définition

L’éthos fait référence à la crédibilité d’un orateur ou d’un écrivain, établissant la confiance et l’autorité sur un sujet spécifique. Cette notion met l’accent sur le caractère, l’expertise, la fiabilité et la réputation de la personne. Un orateur utilisant l’éthos montre ses qualifications, sa moralité et ses connaissances pour persuader son audience.

L’ethos fait appel à : 

  • Crédibilité
  • Confiance
  • Autorité
  • Caractère
  • Expertise
  • Fiabilité
  • Réputation
  • Qualifications
  • Connaissances
Qu’est-ce que le Logos ? Définition

Le logos utilise des faits, des données et un raisonnement logique pour construire un argument convaincant, se basant sur la crédibilité ancrée dans la rationalité plutôt que dans l’émotion. En citant des preuves, des témoignages et des statistiques, et en fournissant un contexte, le logos établit un argument comme logique et solide. Contrairement au pathos, le logos privilégie les explications objectives à la sentimentalité.

Imaginez un débat sur l’importance des énergies renouvelables où l’orateur présente des graphiques montrant la diminution des coûts de l’énergie solaire et des statistiques sur la réduction des émissions de carbone. Utiliser ces données et faits pour soutenir son argument est un exemple de logos.

Logos fait appel à :

  • Données
  • Raisonnement logique
  • Crédibilité rationnelle
  • Preuves
  • Témoignages
  • Statistiques
  • Contexte
  • Arguments solides
Qu'est ce que Pathos ? Définition

Le pathos évoque l’émotion chez un public pour le persuader en faisant appel aux sympathies, à l’imagination et aux relations personnelles. Il influence en ciblant les désirs, les préjugés et les motivations du public. Plutôt que de se baser uniquement sur des statistiques, le pathos utilise un langage vivant, des images et des métaphores pour toucher le cœur et l’esprit de l’audience.

En exemple, imaginez un discours sur la protection des animaux où l’orateur montre des photos d’animaux abandonnés et raconte des histoires émouvantes de leur sauvetage. Cet usage des images et des récits pour toucher le cœur du public est un exemple de pathos.

Pathos fait appel à :

  • Émotion
  • Sympathies
  • Imagination
  • Relations personnelles
  • Désirs
  • Préjugés
  • Langage vivant
  • Images
Quelle est la différence entre Ethos, Logos et Pathos ?

La principale différence entre pathos, logos et éthos réside dans leur approche persuasive.

  • Pathos fait appel aux émotions du public pour influencer ses réactions et ses décisions, en utilisant des récits et des images poignants.
  • Logos s’appuie sur des faits, des données et un raisonnement logique pour convaincre, en se basant sur la rationalité et l’objectivité.
  • Éthos, quant à lui, se concentre sur la crédibilité de l’orateur ou de l’écrivain, en établissant leur autorité et leur fiabilité sur le sujet abordé.

Chacune de ces stratégies joue un rôle distinct dans la persuasion : pathos touche le cœur, logos la tête et éthos la confiance.

Qui est le père de la réthorique Ethos, Logos, Pathos ?

C’est le philosophe Aristote qui le premier à engager ces trois principes de la persuasion. 

Marc Géraud – Formateur en communication orale
marcgeraud.com
Nos formations inter-entreprise

Échangeons sur vos enjeux de développement humain

Échangeons sur vos enjeux de développement humain

Nos autres articles qui pourraient vous plaire

Être acteur de son interview grâce au média training

Être acteur de son interview grâce au média training

Parler, se présenter, donner son opinion face à un(e) journaliste, devant une caméra, un micro ou même à travers un article de presse, est très souvent une expérience transformatrice.  Il s’agit alors de faire face aux médias sans les subir et s’en servir pour faire...

lire plus
Les compétences et soft skills à avoir pour mieux recruter

Les compétences et soft skills à avoir pour mieux recruter

Pour recruter des talents et ainsi rivaliser dans des marchés de plus en plus compétitifs, vous devez non seulement posséder des compétences techniques, mais aussi maîtriser des compétences soft skills. Dans cet article, nous allons explorer ensemble ce qu'il vous...

lire plus
Icone-courier